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Duc in altum

30 août 2013

Plongée n°4... Beaucoup d'autres à venir...

Cet après-midi, plongée sur un spot pas terrible, mais avec un type doté d'un appareil de folie. 

Celles qui viennent sont de moi.

2 fraises Tagada échouée au fond du lagon. Mort de rire, quand j'ai vu ces coraux, j'n'ai pensé à rien d'autre...

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Je sais plus le nom, mais c'est joli comme tout

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Life's hard à Mayotte!

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Le héros du jour et sa machine infernale, permettant de prendre des photos avec flash par -45m...

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Toutes les photos qui suivent sont de ce type, Sylvain, Docteur ès Electronique.

Donc, Christian, sans flash, devant 2 langoustes qu'on voit juste après...:

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Les langoustes... dans le corail rouge, avec flash

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Une murenne. Cette bêbête-là vous croque une main si vous l'approchez. 3m de long. Heureusement pas très véloce...

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Rascasse volante

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Bernard l'hermite tappant l'incruste

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Petit Bonzaï subaquatique...

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24 août 2013

Caribou maoré, hein.

« _ Caribou !

_ Non, moi c’est Christian. »

M’affublant d’une couronne de fleur, François, mon prédécesseur, vient de me souhaiter la bienvenue sur l’île.

Caribou maoré. Bienvenue à Mayotte…

 

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Pour une mission, ça commence bien. Vol en classe Grand Large avant deux ans sur une île tropicale, on a fait pire. Avant de poser, nous avons survolé l’alignement de l’archipel des Comores puis Mayotte, alias l’île hippocampe (pour sa forme et sa faune). Ile de pics et d’eaux turquoise, tout va me plaire ! Les consignes se passent sur une terrasse idyllique en bordure de lagon. Peine à réaliser que c’est mon nouveau cadre de vie, quelques jours après être redescendu de la barre des Ecrins…

 

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 C'est ici que j'ai prit mes consignes... en 4 heures, sur un ordinateur portable.

 

Je découvre vite que l’île porte un deuxième surnom : l’île aux parfums. Ma scandaleuse villa est sur une plantation d’Ylang-Ylang appartenant à monsieur Guerlain.  Et pour cause : la fleur de ces arbres, donne l’essence maitresse de la maison de parfum du même nom.

Bref, je vis dans une parfumerie.

Une quarantaine de villa-clones, certes charmantes, a donc prit la place d’une paradisiaque plantation coloniale voilà 15 ans. Pour avoir vu les photos, je me lève chaque matin en fredonnant la fameuse « au temps bénit des colonies »  et pense que Monsieur Guerlain a définitivement bon goût. Je connais deux Alexis, qui, comme moi, en d’autres temps, auraient quitté famille pour faire ce que firent des Guerlain, Majorelle, Clément, Mariage, Lyautey et tant d’autres.

Un siècle seulement a passé et l’époque est au nivellement par le bas.

Beaudelaire y allait ainsi : « il n’existe que trois être respectables : le prêtre, le guerrier et le poète ». Saint Ex enfonçait son clou à lui en proposant qu’ils guident à nouveaux les nations. On y revient par la violence, les âmes explosant dans leurs cages.

Je me suis surpris la semaine dernière à chanter Hegoak. J’en pleurais de joie.

ylang-ylang 

Ylang Ylang venant d'éclore, littéralement: la "fleur des fleurs"

 

Revenons. Les Ylang-Ylang continuent de nous délecter de leurs merveilles aux heures où le soleil se fait caressant. Celui-ci _nous sommes sous les tropiques_ se lève et couche toute l’année aux mêmes heures : 6 et 18h.

Ainsi chaque soir sur la terrasse, protégé de moustiquaires bénies, la nature m’offre de chanter comme le psalmiste cum odore suavitatis ascéndat

Le matin, je gâche tout avec  l’odeur du pain grillé. On fait ce qu’on peut…

Quant le soleil est au zénith, d’autres merveilles prennent le relais : les geckos du jardin se nourrissent du nectar des roses porcelaine, les lémuriens se bastonnent pour s’arracher les fruits de mes arbres et les noix de coco tombent régulièrement pour rappeler qu’il ne fait pas bon y tendre un hamac.  Détail surprenant, ici les chauves-souris sont insomniaques : des planeurs de 3 mètres d’envergure vous font parfois croire que Batman s’est invité chez vous.

Les fourmis, elles, se chargent de faire de moi un maniaque du rangement et de l’éponge : ce que personne n’avait réussit avant. Un texto annonçant un concert gratuit de David Guetta un samedi soir ne rassemblerait pas autant de monde en une heure qu’une goutte de coca sur le bord de l’évier n’attire de fourmis… 

 

IMG_3423 Rose porcelaine, 30cm de diamètre!

 

Et puis quand la pluie s’invite, l’on se réfugie dans la villa ou par -20m, au choix.

Ma villa est construite, bien maladroitement, selon les principes de nos aïeux coloniaux : toit double, puits de lumière, briques percées, claires-voies et ventilateurs de terrasse. Elle a été repeinte avant mon arrivée, selon la logique mahoraise : d’abord on repeint, après on refait l’électricité, les carrelages, on pose des portes blindées et des gouttières en plastique. Je ne vous fais pas un dessin, le résultat est loufoque. Malheureusement, la loi nous interdit de faire travailler nos propres stagiaires sur les villas militaires et nous force à prendre les entreprises les moins chères qui, ici, bossent comme des gorets.

 

L’alternative à tout cela, disais-je, est en fait le bijou de cette île : son lagon. Une barrière de 150km abritant une faune et une flore à vous faire oublier la pression de votre bouteille m’a décidé à passer en urgence mes niveaux de plongée. Je devrais être autonome d’ici Noël.

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Un "Gobie de feu", prit avec mon iPhone, tout simplement.

 

Toute cette poiscaille se mange aussi. C’est donc l’occasion de passer des après-midi d’apnée entre amis (la chasse en bouteille est interdite, naturellement). Et des soirées barbecue aussitôt rentrés…

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 Yann à l'affut

J’en profite pour placer que mon arbalète a ici une double vocation. La deuxième est dissuasive. L’un de mes adjudants-chefs a eu le bon goût de planter à la cuisse, avec la sienne, un cambrioleur qu’il avait surprit rôdant la nuit dans son jardin. Le cas a fait école semble-t-il, puisque les (nombreux) cambriolages ont cessé cet été dans la résidence. Le blessé a eu la sagesse de ne pas se plaindre aux gendarmes...

Les estimations de la gendarmerie font état que les clandestins représentent la moitié de la population de l’île. Il faut dire  qu’une ou deux heures de catamaran par grand vent me suffiraient à vous emmener aux Comores. Donc la nuit, les pirogues ne transportent pas que des pêcheurs. Et les femmes de ménages ne sont pas déclarées, puisque les seuls indigènes à bosser sur l’île sont les clandés, les allocs de la république et les cambriolages étant plus rentables pour les autres…

 

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Une pub bien à l'adresse des expat's: "profitez de votre nouvelle piscine, Orange s'occupe du reste".

(le fond est une vue du lagon)...

 

Allah Ouakbar !

Non, mes traductions n’ont pas eu ma raison. J’entends juste ce meuglement à peu près toutes les heures, les muezzins mahorais faisant fi du rythme en vigueur des 5 appels quotidiens pour compenser la faible fréquentation des quelques mosquées d’une île pourtant musulmane à 95%. On n’atteint pas non plus des sommets de style, et les mélodies libanaises me manqueraient presque si j’éprouvais le besoin de me limer le front à la manière des ikhwan al muslimin adeptes de Morsi et consors.

 

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Benjamin, mon chef.

 

Parlons un peu boulot.

Ici, de nombreux profs de l’Education Nationale  découvre que les militaires ne sont pas des ânes. A priori, ça leur pique vraiment, parce qu’ils nous font la gueule. Il faut dire que les 89% d’intégration dans la vie professionnelle que nous obtenons chez les jeunes que nous formons rivalisent quelque peu avec les 40% que produisent leurs méthodes. Beaucoup d’entre eux, simplement venus pour épargner de quoi s’acheter leur maison secondaire (les primes d’état sont cossues à Mayotte), nous disent en substance: « vous devez être des marginaux dans l’armée, vous : des gens fins qui ne font pas la guerre ». Alors quand nous leur répondons avec tact que la moitié de nos effectifs revient d’Afghanistan ou du Mali, généralement, ça les laisse rêveurs ou aigris.

Avec ça, vous avez deviné notre job ici : être une sorte d’AFPA ++. On forme les jeunes désoeuvrés & illettrés à un des 21 corps de métier  que nous proposons, leur faisons passer les permis et leur prodiguons l’éducation qu’ils n’ont jamais eue à l’aide de la discipline militaire. Ici, pas de claque, qu’on se le dise. Cela s’appelle le SMA : Service Militaire Adapté. Vieux de 30 ans, ce concept, destiné aux appelés d’outre-mer pour compenser le déséquilibre de développement des trente glorieuses entre la métropole et ses annexes, n’est pas mort à la fin de la conscription. Maintenant, les jeunes sont simplement volontaires, et ça se bouscule au portillon. Figurez-vous que nous avons l’honnêteté de refuser les meilleurs pour prendre les pires, ce qui accable encore plus les résultats de nos compères de l’Education Nationale.

 

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Le PC: mon bureau est à l'étage, à gauche.

 

Quand je pense que j’offusquerais certains profs si je leur disais qu’il est salvateur pour un jeune de nettoyer lui-même son cadre de vie : les nôtres finissent par aimer faire le ménage tous les matins, vivent dans un vrai jardin chinois version tropicale dont ils sont les créateurs et n’imaginent pas cracher ou jeter une cannette par terre…

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Une autre petite vue du SMA. Pas étonnant que les entrepreneurs soient... preneurs.

 

Je me prends juste parfois à rêver qu’un politique ait les c… de nous donner la mission (avec les moyens afférents : lettres de commandement, autonomie des méthodes et budgets) de faire de même avec nos « sauvageons » du 93. Certes la mission en serait moins exotique, mais la France y gagnerait. Mais nos chers gouvernants préfèrent de loin priver l’armée de 26.000 postes supplémentaires en 4 ans pour en reverser le triple dans l’EN et arroser quelques médiateurs salafistes à la clé, visiblement bien plus rentable... Vive la France.

Ils préfèrent visiblement réfléchir à déconstruire les « stéréotypes de genre », il est vrai que c’est bien plus urgent pour le salut de la communauté nationale. 

 

Passons.

Si je devais résumer Mayotte, je dirais assez crûment : une île paradisiaque peuplée par un peuple paresseux vivant sous des règles mixant la tradition africaine, l’islam et quelques lois de la grasse république. Le tout arrosé depuis 2011 d’un nappage d’aides sociales dont l’avenir nous dira si elles ont tué l’île ou non. A priori, je pencherais pour la première option. Je reconnais que ce n’est qu’une intuition. Affaire à suivre.

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